Une discussion avec une patiente cette semaine m’a donné envie d’écrire un article sur la raison pour laquelle j’ai eu envie de devenir diététicienne :-) Elle me disait qu’un des éléments « motivants » dans le suivi fourni par une société bien connue pour ses « régimes » était que les animateurs des réunions sont tous des « anciens » clients. Les participants se sentent donc non jugés et surtout compris.

Ce qui m’a parlé dans sa réflexion c’est qu’elle a exactement décrit ce que j’aime dans ce métier : écouter les ressentis de mes patients, les comprendre et m’adapter à eux pour les aiguiller dans leurs changements. Je dis souvent qu’on ne devient pas diététicien par hasard (ce qui doit être la même chose pour d’autres métiers d’ailleurs) et dans mon cas cette voie a été une réelle révélation !

J’ai été baignée dans mon enfance entre 2 cultures – belge et mexicaine – ce qui a déjà ouvert mon esprit aux différentes cuisines et leurs saveurs et mélanges propres. Mes parents m’ont donc permis de n’avoir aucun a priori par rapport à tel ou tel aliment, et j’ai eu la chance d’avoir une alimentation extrêmement variée dès la naissance.

Quand j’avais 8-9 ans, l’alimentation familiale a dû être adaptée pour raisons médicales et c’est comme ça que des livres concernant l’alimentation ont commencé à fleurir dans notre cuisine : Montignac, cuisine sans sel, cuisine régime, poissons… Ca a probablement été la première révélation pour moi : l’alimentation peut influencer notre santé ?!

En grandissant, ma vision de l’alimentation a commencé à évoluer. Je suis alors devenue consciente que l’alimentation influence non seulement la santé, mais aussi le poids. Comme de nombreuses jeunes filles de 12-13 ans dont le corps évolue, j’ai eu cette (sale) période de mal-être où je me sentais « grosse » (et moche) et où mon exemple était Pamela Anderson dans Alerte à Malibu (!!!). Cette image de femme (très) mince, blonde et en maillot rouge m’obsédait et je me disais qu’un jour je serais comme elle (sans le blond ;-)). J’ai donc entamé mon premier régime : un plan alimentaire suivi par la mère d’une copine ! Je m’en souviens encore, c’était un régime très hypocalorique dans lequel une fois par semaine on ne devait rien manger le soir. Le reste du temps bien sûr ce n’étaient que légumes (je me souviens du chou rave), cracottes et yaourt maigre. J’ai donc obligé ma maman a acheter les ingrédients « permis » et à adapter ses menus pour moi. Argh. J’ai aussi alors commencé à traquer les graisses et à bannir les aliments réputés gras, surtout les chips et les frites que je m’esquintais à éponger pour ensuite les manger avec « bonne conscience ». Encore argh. Mais à côté de ça que faisais-je ? Je mangeais un paquet de biscuits secs à midi et 1 pomme (je pensais qu’un biscuit « sec » n’était pas gras et que la pomme faisait « éliminer »), à 16h j’avais faim mais m’empêchais de manger jusqu’à ne plus me retenir et avaler 1 paquet de biscuits ou de gaufres (et le reste), et le soir bien sûr je prétendais que je n’avais pas faim. Argh argh argh. Bien évidemment et malgré que je faisais énormément de sport, non seulement je ne devenais pas Pamela mais en plus je prenais du poids. Et surtout, me nourrir devenait une sorte de combat de moi-même contre ces aliments que j’adorais mais qui étaient devenus mes ennemis…

14 ans a été l’âge de la vocation : notre professeur de biologie a eu cette idée de nous apprendre les bases de la nutrition et nous a donc expliqué les vitamines, minéraux mais aussi les macronutriments et leurs valeurs énergétiques respectives. Nous sommes repartis à la maison avec un devoir : tenir un journal alimentaire et tenter de calculer les calories ingérées sur une journée. C’est là que j’ai compris que c’était un métier, et que c’est celui que je voulais faire. C’était la solution pour maîtriser toutes ces incertitudes que j’avais concernant l’alimentation. Je voulais comprendre pourquoi les aliments influencent notre santé, comment ils sont digérés, comment ils sont utilisés.

Les études de diététique se sont révélées bien plus difficiles que ce que j’imaginais : chimie, mathématiques, physique, physiologie, anatomie, psychologie… n’étaient pas dans mon programme ! Mais quelle claque encore, car je me suis alors aperçue à quel point cette discipline est importante car globale et ne se limite pas à calculer des calories et à faire maigrir les gens. Non, la diététique permet aussi de renourrir des gens malnutris dans les pays en voie de développement, de sauver des gens souffrant d’insuffisance rénale ou de diabète, de supprimer les symptômes du côlon irritable… Waouw…

C’est là que tous mes « tabous alimentaires » sont tombés, et que je suis redevenue meilleure amie avec la nourriture (j’ai toujours adoré manger !). Et c’est ce que jour après jour j’essaie de faire passer comme message à mes patients jeunes ou moins jeunes, désespérés, pressés, désillusionnés, déçus, tristes, (complètement) perdus : l’alimentation n’est pas votre ennemie, il suffit juste de l’apprivoiser un peu comme le Petit Prince et son renard.