Il n’a qu’à manger moins ! Bah, t’as vu ce qu’il mange ?! T’as qu’à faire du sport ! Si elle le voulait vraiment elle perdrait du poids !
Toutes ces phrases assassines sont non seulement blessantes mais aussi « à côté de la plaque ». Si la solution à l’obésité – si perdre du poids – n’était qu’une question de volonté, ce serait tellement simple. Il suffirait qu’une personne obèse se dise un beau jour : « Ah la la, ça y est maintenant j’ai envie de ne plus être obèse, je vais maigrir ». Et paf, par miracle tout serait réglé.
Malheureusement ça ne fonctionne pas comme ça.
Observons l’évolution de la proportion de personnes en surpoids ces dernières années, et les régimes miracles qui ont fleuri en parallèle…
Pourtant ça fait déjà longtemps que l’obésité a été qualifiée comme étant une maladie. Une maladie multifactorielle, c’est-à-dire dont les causes sont multiples.
Bien loin du simple principe de cause à effet « tu manges trop donc tu grossis », menant à la solution tout aussi simple « tu veux maigrir donc tu dois juste manger moins », l’obésité doit se traiter comme une maladie en prenant compte toutes ses facettes.
Ce qui est compliqué dans cette maladie, c’est qu’il existe autant d’obésités que de personnes atteintes d’obésité ! Il n’y a pas de médicament miracle, il n’y a pas d’unique solution. Dans certains cas on va effectivement cibler l’équilibre de l’alimentation, dans d’autres on va y ajouter l’activité physique.
Dans tous les cas on va aborder le mental, la relation à l’alimentation.
Car si équilibrer l’alimentation ça peut paraître évident – « va voir une diététicienne, elle va te dire ce que tu dois manger » – il n’en est rien ! Bien sûr qu’en consultation je peux donner les bases de l’alimentation saine, proposer des adaptations, aiguiller dans les choix de menus, faire de l’éducation nutritionnelle… mais bien souvent ceci vient en complément de ce qui entoure l’alimentation.
Depuis mes années de consultations je dois avouer que mon état d’esprit a évolué, grâce à mes patients qui se sont confiés et m’ont permis de comprendre en profondeur le mécanisme menant à cette maladie. Et surtout à comprendre la raison pour laquelle c’est si difficile d’en sortir.
En réalité, je compare cet attrait pour la nourriture à une forme d’addiction comme une addiction alcoolique par exemple. Dans les 2 cas, la personne :
- ne sait pas vraiment comment « ça a commencé »
- trouve un certain réconfort après consommation
- en vient à chercher ce réconfort dans des moments émotionnels (tristesse, joie, anxiété, stress, fatigue…)
- ressent (parfois) une forme de culpabilité juste après ou peu après consommation
- se met dans une forme de déni
- augmente les doses pour un même effet : quantité d’alcool dans l’alcoolisme, portions ou dose de gras/sucre/sel dans le surpoids
- … finit par entrer dans un cercle vicieux : je ressens le besoin de consommer, je veux résister, je ne résiste pas, je m’en veux, je consomme plus…
Dans les 2 cas aussi, si l’entourage tente d’intervenir par des remarques ou des actions radicales, le résultat de ces interventions est nulle. Par exemple :
- répéter inlassablement « arrête de bouffer » ou « arrête de boire »
- cacher ou jeter la nourriture ou les bouteilles d’alcool
- culpabiliser
- donner des conseils bateaux de type « mon collègue a fait ça et ça a bien marché pour lui ! »
- tenter de faire peur : « tu sais, le surpoids c’est pas bon pour le coeur », « tu veux pas vivre longtemps pour tes enfants ? »
Et c’est pour ça, exactement pour ça qu’il s’agit non pas de vouloir traiter de suite la conséquence (le surpoids) mais d’agir en profondeur pour en comprendre l’origine. Les deux pouvant se faire en parallèle, évidemment.
Notes :
- Le cas de l’obésité chez les enfants est particulière et nécessite une prise en charge encore différente de celle des adultes. Les enfants sont en plein développement à tous niveaux, et sont dépendants de l’environnement et des habitudes familiales. Plus vite un enfant est pris en charge, plus il a de chances de retrouver une évolution staturo-pondérale (taille et poids) normale.
- Je compare ici l’attrait pour la nourriture à une vraie addiction mais il ne s’agit absolument pas des mêmes mécanismes psychiques et neurologiques. Cette comparaison n’est faite que dans un but d’illustration.